Mahé de La Bourdonnais, gouverneur des îles Mascareignes.

Les historiens Auguste Toussaint et le professeur Philippe Haudrère ont écrit des ouvrages où figure Mahé de La Bourdonnais. L’on ne peut pas se contenter d’extraire quelques-uns de leurs paragraphes, pour étayer des thèses qui réduisent le rôle de ce gouverneur à celui d’esclavagiste.

Nous connaissons les plaies ouvertes par les pratiques de l’esclavage et par la chasse aux marrons. Est-ce en déboulonnant la statue de Labourdonnais à Saint Denis de la Réunion, que l’on arrivera à cautériser les blessures de l’histoire ? Le professeur d’université Prosper Eve l’a très bien souligné.

- A la lecture des historiens nous découvrons ce gouverneur qui a tant fait pour Bourbon (La réunion) et l’Isle de France (Maurice) et pour le rayonnement de la France en Océan Indien entre 1735 et 1746.

Mahé de Labourdonnais et la mise en valeur des îles.

Nommé gouverneur des Iles Mascareignes pour le compte de la Compagnie des indes, il déploie une impressionnante activité dans tous les domaines.

- A l’Isle Bourbon il se fait bâtisseur, dessine les plans de Saint-Denis, la capitale, créé et développe des villes côtières.

Il fait venir des artisans spécialisés, en particulier des charpentiers de marine, ainsi qu’une centaine d’artisans indiens. Les esclaves sont initiés au travail du bois, de la pierre, de la maçonnerie, aux métiers de la marine et au maniement des armes. Ils participent à la construction de casernes, d’hôpitaux, de bâtiments administratifs, d’églises, de manufactures, de magasins, de routes. A Saint-Denis, il fait fabriquer un ingénieux pont volant pour charger et décharger les navires.

L’Isle Bourbon se transforme en grenier d’approvisionnement. Passionné d’agriculture, Labourdonnais assure la bonne conservation du café bourbon en faisant bien sécher les grains dont il assure la promotion. Il encourage la culture du coton et de l’indigo. Il encourage les colons à planter du blé́, du riz, de haricots, de fruits exotiques mais aussi du manioc et du maïs qu’il ramène du Brésil. Il sait qu’entre les mois de décembre et avril, les cyclones peuvent ruiner les plantations et provoquer des disettes.

-  A l’Isle de France, Labourdonnais crée le Port-Louis et en fait le siège du gouvernement des Mascareignes.

En véritable ingénieur, il fait creuser le Port-Louis et fait baliser le chenal d’accès. Un arsenal est aménagé en vue de réparer et construire des bateaux pour la navigation à destination de Madagascar, des ports d’Afrique orientale et de l’Inde. Il utilise les bois locaux ainsi qu’un petit gisement de fer. Il entreprend d’importants travaux de défense, dont deux fortins pour garder l’entrée du port. En urbaniste de talent, il dessine les plans de la capitale, en introduisant des canaux d’évacuation des eaux de la montagne.

Il s’applique à développer le commerce maritime en multipliant les échanges entre la côte d’Afrique et les îles et en cherchant de nouveaux débouchés pour le café en Asie. Il présente aux dirigeants de la Compagnie des Indes des projets ambitieux pour les îles Mascareignes en vue de concurrencer l’activité des compagnies hollandaise et anglaise.

Dans les îles sœurs, il veille à la santé de la population et des hommes d’équipage. Il subit des épreuves personnelles lors du décès de ses deux enfants en bas âge, puis de sa femme.

Les ambitions militaires de Labourdonnais.

En 1740, il remet au secrétaire d’État de la Marine, un plan de guerre pour donner aux Français la supériorité́ navale en Mer des Indes.

Élevé au grade de capitaine de frégate de la Marine Royale, il reçoit le commandement de 5 navires. (Lors de ce voyage en avril 1741, il récupère à nouveau au Brésil des plantes et de la canne à sucre).

Il mène des opérations militaires et rétablit l’ordre dans le sud de l’Inde en sauvant Pondichéry et Mahé. Mais, de retour au Port-Louis, sur ordre de la Compagnie, Labourdonnais doit renvoyer l’escadre en France.

Comme il le craignait, dès la déclaration de la Guerre de Succession d’Autriche le 15 mars 1744, les Anglais s’emparent des bateaux de commerce de la Compagnie. La Bourdonnais forme alors une escadre de fortune à l’Isle de France, où sont enrôlés des esclaves. Il sera fier de leur participation. Il obtient une victoire navale à Nagatapam, puis fait le siège de Madras qu’il prend en septembre 1946…

- En conclusion, ce malouin a certes été un grand militaire et marin, il a surtout beaucoup œuvré au développement des îles Mascareignes.

- « Le vivre ensemble » doit-il pâtir d’un projet de « déboulonnage » de la statue de ce gouverneur ?

Les enseignements du Memorial ACT à la Guadeloupe seraient fort utiles à ses détracteurs.

 Article de Georges Toussaint 18 juin 2023